Emission radio. Live les Dimanches de 20h à 22h sur le 95 fm (RQC- radio locale Mouscron-Kortrijk- Lille Métropole).

En écoute ici en streaming.

Pataugeage dans toutes les mares ! (Rock, Electro, Jazz, Hip-Hop, leurs dérivés connus, inconnus ou oubliés)

Tous les Canards vont à la Mare est une réalisation produite par Animation Média Picardie.

co : touslescanards@gmail.com

dimanche 25 mars 2012

Archive de la Semaine : Sloy - Plug (1995)

Histoire d’une ascension fulgurante.
En mars 1995, le trio bitterois se produit lors d’une Peel Session sur la première chaîne radio de la BBC. John Peel a vu le trio durant les Transmusicales de l’année précédente et il est conquis.  Les syncopes rythmiques du groupe font mouche. Il est d’ailleurs l’un des rares groupes rock à avoir assimilé des structures hip-hop dans sa musique entre Punk et groove froid. Ensuite, comme le prouve ce premier album, le groupe construit pas à pas un vrai univers dédié à la fée électricité.  Cette année-là, Steve Albini himself prend en charge ce premier grand format et invite le groupe sur les routes en ouverture de Shellac.  La frange alternative, au mieux de sa forme, ouvre grandes les portes de la reconnaissance au jeune groupe et PJ Harvey ne s’y trompe pas en offrant une première partie à Londres.



L’histoire de Sloy repose sur la mythologie bien connue des groupes rock. Des jeunes passionnés de musique se rencontrent et décident de monter un groupe avec comme singularité,  l’idée monomaniaque de provoquer la rencontre entre Talking Heads et Public Enemy.  Béziers, l’accueil est plutôt froid, qu’à cela ne tienne, ils embarquent dans un van pour rallier Rennes où la vigueur locale pour les défricheurs est bien plus présente (de Daho à Tagada Jones en passant par Marquis de Sade, pour les plus notables – mais combien d’autres !). Le groupe enregistre un premier 4 titres Fuse où tout est déjà dit dans ce que proposera le groupe par la suite.  Les portes des Trans s’ouvrent et les mènes jusqu’à cette fameuse année 1995.
Plug est enregistré en 5 jours, pas un de plus. Il comporte 10 titres pour 40 minutes. Le propos est concis. Dès les premières mesures de « First Animal », on comprend que nous avons à faire à une entité bien à part.  La vague chicagoanne a beau lever de nombreux remous – les écoles Touch & Go et Amphetamine Reptile -, le groupe œuvre bien dans une démarche assez unique. Leur musique sera résolument sèche et brute. 


Impossible d’aborder Plug sans s’arrêter sur le phénomène « Pop ». LE single tueur par excellence, une pure merveille de précision et de jusqu’au boutisme. Pour trouver aussi sec et dense, il faut remonter jusqu’au « I wanna be your dog » de l’iguane et ses Stooges… en 1969.


Etrangement c’est le label Roadrunner qui va distribuer l’opus,  en France et dans le Bénélux avant de pousser les frontières. Avec le recul, le groupe n’est pas satisfait du label métal, les autres albums sortiront chez PIAS.  Etrangement, pas de traces de Touch & Go ou Amrep pour prendre en considération le groupe. Un élément important dans la carrière du groupe. Nous sommes en droit de nous demander ce qu’il serait advenu de la trajectoire du groupe, si un label concerné s’était penché sur le groupe. Si le groupe bénéficie toujours d’un statut de groupe culte auprès d’une poignée de passionnés  - les mêmes qui veulent revoir Drive Blind,  A Subtle Plague, Virago et Portobello Bones (+ cARN pour ma part) - ; nous sommes en droit d’estimer que les labels qui ont hébergé Sloy  successivement n’ont pas assuré une reconnaissance méritée au groupe, notamment à en vouloir les comparer (les vendre) au (comme) Jesus Lizard frenchie. Une étiquette aisée à défendre pour l’époque, mais tellement éloignée de la vérité.


Plug accuse 17 ans cette année, à l’instar des autres albums du trio, l’album apparaît toujours comme un bloc monolithique, monothématique… pour beaucoup, cet album est le meilleur du groupe. Tous  cherchent le « Pop » dans les albums suivants. Sloy est bien plus qu’un groupe de single, leur « dog » à eux, implacable d’efficacité ne doit pas cacher l’œuvre totalitaire du combo, le définitif Planet of Tubes et l’introspectif Electrelite se suffisent à eux-mêmes. Virginie, Cyril et Armand ne cherchent d’ailleurs pas à copier leur passé avec leurs nouveaux projets respectifs, ils choisissent des chemins différents.  Reste 3 albums à (re)découvrir,  une poignée de singles introuvables et pour ma part, cette délicieuse folie entre passion électrique et énergie pure que le trio dégageait lors des concerts.


Tracklist : First Animal – Pop – Game – Exactly – Many things (to wear) – X –Devotion – Old Faces – My Flies –Bad News – You Cry








Album de la semaine : White Hills - Frying on this Rock

White Hills - Frying on this Rock


Interview de White Hills, par Laurent de Fuzzine, 2010

Dernière émanation de l’increvable rock aux lance-flammes, White Hills marie les charges stoogiennes au côté spatial d’Hawkwind. Pour un résultat à décorner un auroch, puis à faire planer Stonehenge. Le tout dans la même foulée. Rencontre avec la tête pensante derrière tout ceci. Attention, ce jeune homme ignore l’usage de l’attendrisseur, dans sa musique que dans ses propos. Ça change un peu.


L : Présentation à nos lecteurs.

DW : Mon nom est Dave W. Je suis le seul responsable pour cette chose qui se nomme White Hills. Sur le premier album (No Game To Play), je jouais de tous les instruments. Maintenant, je tiens la guitare, le synthétiseur et je chante. Depuis, j’ai formé un groupe avec Ego Sensation (basse/vocaux) et pour l’instant Kid Millions (d’un groupe de Brooklyn nommé Oneida) à la batterie. White Hills est mon enfant, ma vision artistique.

L : Premier et dernier disques achetés.

DW : Ça c’est difficile, pas sûr que je m’en souvienne. Mais je peux vous parler des disques qui ont changé ma vie. J’avais environ dix ans, et un jour j’ai acheté Never Mind The Bollocks des Sex Pistols, Radio Appears de Radio Birdman et Rust Never Sleeps de Neil Young. Ces albums ont changé ma vie. Ils m’ont donné envie d’apprendre la guitare. Un de mes amis avait deux frères plus âgés. L’un était au collège, l’autre en fac, et ils écoutaient des trucs punks. On passait notre temps dans leurs disques, et un jour j’ai acheté ces trois-là. Mes derniers achats sont Immortal Life et Renihilation par Liturgy. L’autre nuit, je suis allé voir Shrinebuilder, le super groupe de Stoner. Avec Wino de St Vitus, Al Cisneros (OM Sleep) Dale Cover (Melvins) et Scott Kelly (Neurosis). Liturgy était en première partie, ils m’ont explosé la tête. C’est un groupe de black métal, un genre qui ne m’intéresse pas, d’habitude. Mais ces types avaient quelque chose de différent. Leur musique est complètement partie, avec une sortie de vibration alcoolisée. Quelque chose de différent dans son genre, très intense. Quand ils ont terminé, je suis allé directement à leur stand, pour acheter leurs deux albums. Là j’écoute Renihination.Fantastique.

L : Par qui étiez-vous influencé en commencent votre carrière de musicien ?

DW : Au tout début je citerais Neil Young et Public Image Ltd, spécialement leur second album, Metal Box. Le plus influent dans mon développement de guitariste. PIL m’a fait considérer l’instrument d’une autre façon. Quand on en vient à la musique, je suis une véritable éponge, j’absorbe tout. On peut dire que je suis la somme de tout ce que j’ai entendu dans ma vie.

L : Parlez-nous de ce groupe anglais nommé The Heads, dont vous semblez très proche.

DW : Ils sont de Bristol, et là depuis un bon moment déjà. Une bande de mecs bien. On a enregistré un disque ensemble, sorti sur Rocket Recordings plus tôt dans l’année.  À mon sens, c’est un des meilleurs groupes actuels. Ils se foutent des modes, font leur truc et le font si bien.

L : Comment êtes-vous entré en contact avec Julian Cope ? Etait ce une bonne (étrange ?) expérience ?

DW : Je suis fan de Julian depuis longtemps. Quand j’ai enregistré ce qui allait devenir le premier album de White Hills, je sentais que si quelqu’un pouvait m’aider, c’était lui. Donc, je lui ai envoyé une copie. À ce moment-là, White Hills n’était que moi, un projet pour satisfaire mon amour du rock spatial. Julian  a aimé ce qu’il a entendu, et m’a demandé si j’étais intéressé par une sortie sur son label Fuck Off & Di. J’ai sauté sur l’occasion, et White Hills est né de là.  L’expérience était géante. Julian est une personne incroyable, avec une vision peu commune. Jamais je ne le remercierai assez pour son aide. La partie la plus étrange de l’aventure fut de lui parler au téléphone, la première fois. Je me disais « Mec, tu discutes avec ce putain de Julian Cope ».  J’ai vénéré l’homme et sa musique pendant des années, et maintenant j’ai une conversation avec lui, d’égal à égal, pas juste en tant que fan. J’en avais la tête explosée.

L : Quelle est votre opinion sur le téléchargement ? Que faudrait-il pour que White Hills signe sur une grosse major ? Pensez-vous qu’elles vont au suicide ?


DW : Que voulez-vous faire contre le téléchargement ? Les gens ont toujours partagé de la musique, et le feront toujours. L’industrie musicale pensait que les cassettes allaient la ruiner, et c’est faux. Une des meilleures choses pour découvrir un groupe, c’est le bouche à oreille. Le téléchargement a ce rôle. Quelqu’un pense assez de bien d’un disque, pour en faire des copies. De là, vous espérez que ceux qui vont écouter deviendront fans, viendront vous voir jouer, et achèteront éventuellement vos disques. Les grosses maisons de disques font tout pour se tirer dans le pied. Le prix des disques est seulement une de leurs erreurs. La musique est un art pour moi, pas une commodité. Je veux dire, a-t-on vraiment encore besoin d’un lot de rééditions des Beatles, des Rolling Stones ou de Led Zeppelin ? Les nouveaux artistes signés sont vendus comme des trucs jetables, comme de la bouffe surgelée. Il n’y a rien pour vous nourrir, c’est vide. Un petit tour, et on en parle plus, sitôt mâché sitôt chié. Plus de gaspillages que la terre n’en peut digérer. Signer avec ces gens, ne me vient même pas à l’idée. Ce que je fais n’est pas ce qu’une grosse boîte imagine pour un artiste. White Hills est trop vrai, trop pur. Pas calculé et emballé pour consommation de masse.

L : Qui sont les nouveaux groupes intéressants pour vous ? La rébellion dans le rock existe-t-elle toujours ?
 WHills.jpg
DW : Les nouveaux groupes que j’écoute... Il y aurait un livre à écrire là-dessus. Tant de bonne musique arrive en ce moment. Je suis toujours stupéfait par la survie de l’underground.  D’année en année, c’est de plus en plus grand. Récemment, je me suis intéressé à Aqua Nebula Oscillator, Serpentina Satelite, Eternal Tapestry, Wowenhand, Mydriasi, Aluk Todolo, Mondo Drag, Der Blutharsch, et la liste est infinie. Il a une telle quantité de bons trucs, juste à prendre le train et à chercher. C’est un des meilleurs côtés de Myspace, vous pouvez passer votre temps à chercher et à trouver de bons nouveaux groupes, de tous les horizons. Le rock est immortel, chaque génération aura ses rebelles. Il y a quelque chose de très primaire dans la musique puissante. La technologie avance, mais basiquement nous sommes seulement des animaux, qui fonctionnent à l’instant. Et l’un d’eux est de répondre à une urgence basique, reçue à travers n'importe quelle forme de musique. Chacun réagit à la musique qu’il aime, au niveau des tripes. Parce que ça enflamme quelque chose qui vous parle. 

L : Quelle est votre opinion sur Obama ? Qu'est-ce qui peut sauver le monde de cette bouse économique ?

DW : Obama a de bonnes intentions. Mais il reste un politicien. Ils sont tous les mêmes, sous n’importe quelle étiquette. Ils servent les intérêts de ceux qui ont du pouvoir et de l’argent. Les masses sont laissées dans la poussière, à payer les pots cassés. La seule façon d’en sortir est de détruire le système capitaliste, et de tout reconstruire. Se débarrasser des bâtards capitalistes qui sèment la merde, et vous la verrez disparaître. Mettez des politiques qui feront tout pour que tout ça n’arrive plus, et ça marchera. On ne peut pas regarder Obama comme celui qui réglera le problème. Il est juste un des rouages du système qui a déraillé. Nous les gens, les masses, avons notre mot à dire. Nous devrions être ceux qui vont tout foutre en l’air, et se débarrasser des parasites qui accaparent notre misérable argent. Pendant qu’ils s’enrichissent, et que les gens crèvent.

L : Sur votre site, j’ai vu que vous aviez tourné en Europe, cette année. Comment était-ce ?

DW : Oui, nous avons joué chez vous en Avril et Mai. C’était super, comme toujours en Europe. Ce qui explique que nous soyons venus deux fois par ans, dans les trois dernières années. C’est chaque fois meilleure.  On revient en Février/Mars 2010, avec nos copains du label Pontiak. Nous jouerons en France, Angleterre, Belgique, Suisse, Hollande, Suède, Allemagne, Autriche, Italie, Slovénie, Croatie, et en république Tchèque.

L : Et le futur ?

DW : Continuer à faire notre truc, toujours évoluer. On verra bien comment les choses prendront forme. Je vois White Hills comme une pièce d’art conceptuel, qui s’adapte à la forme du moment donné.


Line Up:
Dave W. 
Ego Sensation 

Label :
Thrill Jockey

Tracklist :
01 – Pads of Light
02 – Robot Stomp
03 – You Dream You See
04 – Song of Everything
05 – I Wrote a Thousand Letters (Pulp on Bone)

dimanche 18 mars 2012

Archive de la Semaine : Sonic Youth - S/T (1982)



L’archive du jour est quasi anniversaire, le premier album de Sonic Youth, enregistré entre décembre 1981 et fin janvier 82, voit le jour pour la première fois le 17 mars suivant, soit il y’a tout juste trente ans.
L’album comporte 5 titres d’une grande diversité.  Considéré comme un EP, il est réédité le 14 mars 2006 avec un titre bonus « Where the red fern grows » et 6 titres live issus d’un concert du Music for Millions Festival au New Pilgrim Theatre, New York (18 septembre 1981).  Ce que l’on retient dans ces premiers enregistrements,  ce sont les syncopes rythmiques,  quasi hypnotiques, une basse résolument dub et monolithique qu’accompagnent des guitares qui ne sonneront plus jamais aussi claires. Le groupe navigue entre The Fall, le premier Killing Joke et bien sûr la vague no-wave new-yorkaise à laquelle le groupe va plus que contribuer. Cependant, l’ensemble n’est pas versé dans la veine la plus expérimentale, un album comme Bad Moon Risin qui sort en 1985 (troisième album des new-yorkais) va bien plus loin dans la recherche et va asseoir le groupe dans la frange des groupes dissonants (pour influencer des palettes de jeunes pousses).
Sonic Youth, l’album, souffre souvent d’un procès d’intentions concernant la qualité des titres qui ne seraient pas aboutis, juste jetés en pâture pour pouvoir tourner au point d’en faire un album souvent oublié ou méprisé par « les connaisseurs ».  Foutaises.


On trouve dans ce disque une vraie liberté. Oui, un son semble avoir été adopté, de même que des mesures de guitares qui reviennent sur tous les titres.  Ce parti pris donne une vraie personnalité et place ce disque un peu à part du reste de la discographie du groupe.  On pourrait considérer que le combo est libre à l’instar des formules qu’il  va élaborer pour le reste de ces albums.  En trente ans, le groupe a vécu pas mal de périodes et finalement on peut trouver un son qui couvre plusieurs albums tous interchangeables.  Dans les 90’s, il y’a bien Experimental, Jet Set, Trash and No Star qui fera un pas de côté. La dernière décennie qui couvre grosso-modo A thousand leaves à The Eternal assoie ce postulat de disques monothématiques, par exemple, sans que cela enlève quoique ce soit à la qualité des titres proposés.


Réécouter cet album trente ans plus tard (17 pour ma part, fallait le temps que je le découvre) donne une belle impression de spontanéité,  et Suicide nous vient à l’esprit pour le ton sentencieux d’un « The Burning Spear » par exemple.  Entre psychédelisme minimal, dub et percussions invasives (on redécouvre les riddims de leur premier batteur Richard Edson),  ils créent leur univers urbain bien à eux.

Tracklist : The Burning Spear – I dreamed I dream – She’s not alone – I don’t want to push it – The Good and the Bad




Album de la semaine : Thievery Corporation - Culture of Fear

Thievery Corporation - Culture of Fear


Interview de Thievery Corporation, par Grégory Papin de WSound


Musiciens stylistes, Rob Garza et Eric Hilton de Thievery Corporation comptent parmi les plus influents membres de la communauté downtempo. De singles épatants en compilations essentielles (telle la dernière « Jet Society »), en passant par leur premier album « Sounds From The Thievery Hi Fi », ils ont posé les fondations d’une musique à dominante échantillonnée, multidirectionnelle mais surtout très agréable. Certes ce ne sont pas des techniciens hors pair ou des innovateurs acharnés, mais leurs compositions pour salons enfumés valent le détour, ne serait ce que pour leur façon de se fondre dans certaines ambiances. Leur prochain album (« The Mirror Conspiracy », en chronique) ne sort qu’au mois de septembre, mais ils sont déjà dans Wsound. Enfin seulement Eric, Rob étant retenu pour affaires à l’autre bout de la planète. 
 
J’ai lu quelquepart que Rob était employé dans une société de contre espionnage. Tu as le droit d’en parler ?
Oui, c’est à peu près ça. Son père gère une boite privée anti terroriste, CTI. C’est un ancien policier de Chicago expert en anti terrorisme auprès d’organisations internationales comme l’ONU. Le genre de mec qui fit des négociations dans les prises d’otage, des trucs sérieux. En fait, je peux te le dire parce qu’il est absent, Rob était une sorte de délinquant juvénile, condamné pour vol de voitures et petits larcins. Son père a fini par l’embaucher dans sa société et ça l’a complètement transformer. Il travaillait à la sécurité de l’aéroport de Chicago, et c’est là qu’il a commencé à mettre des costumes et à y prendre goût. Maintenant il se fait faire ses costumes sur mesure par Mr Eddy, un tailleur très réputé de Londres.

Puisque tu viens à en parler, cette manie du port du costume n’est-elle pas parfois une contrainte ? 
On aime s’habiller, être élégants. Et pour les hommes il n’y a guère le choix : ce sont les costumes. C’est très agréable en hiver mais c’est vrai que ça dépend du temps et même de notre humeur. Et la presse s’amuse un peu trop avec ça. Mais on ne sait jamais ce qui va arriver. L’année dernière, on est allé jouer sur une péniche en Allemagne, et il a commencé à faire chaud, je veux dire très très chaud, avec la condensation sur les murs et tout ça. Au bout d’un moment on a enlevé nos chemises et à la fin on était quasiment à poil. Les spectateurs ne s’y attendaient pas mais on ne pouvait pas faire autrement. 

Vous sortez sans relâche des compilations plus ou moins thématiques. Qu’est ce qui vous plait dans cette activité ?
Il y en a de toutes sortes. « 18th Street Lounge » était une collection de chansons populaires dans notre club, qui a le même nom. « Dubbed Out In DC » rassemblait des tracks plutôt à consonance dub / drum & bass. « Covert Operations » rassemblait les morceaux inédits de Thievry Corporation. « Jet Society » est dédiée à la musique classieuse. On aime beaucoup compiler des morceaux. On prépare quelque chose pour Verve en ce moment, une compilation de nos morceaux préférés piochés dans leur catalogue – c’est énorme -. On va peut être d’ailleurs remixer Astrid Gilberto pour eux également. Et puis sur notre propre label, qui s’appelle également 18th Street Lounge, on va peut être faire une compilation de ‘library music’, ces musiques d’illustration enregistrées à la va vite par de piètres musiciens mais qui donnent parfois des résultats hallucinants. Le travail artistique à la chaîne. A ne pas confondre avec de la musique de bibliothèque. Aux Etats Unis les gens ne comprennent pas l’expression.

Votre musique est basée sur l’échantillonnage. Que répondez vous aux gens qui vous accusent de pillage, même si c’est un pillage revendiqué ?
Je le dis souvent mais notre musique est véritablement la création de notre collection de disques. Où qu’on aille on cherche des disques rares, des musiques que l’on ne connaît pas. Il faut comprendre que c’est un travail en soi que de collectionner. Mais on utilise également des musiciens, et de plus en plus. On refait d’ailleurs notre studio et on se prépare à enregistrer des musiciens, c’est l’une de nos principales préoccupations. On travaillait avant de partir avec un joueur de harpe et un type qui joue du rhapsichord.

On retrouve sur « The Mirror Concpiracy » votre tube "Lebanese Blonde" , paru il y a déjà un peu de temps.
Ce sont les problèmes de calendriers des distributeurs. L’album entier aurait pu sortir il y a neuf mois. Mais ce n’est pas très grave, c’est une bonne chanson.

Il y a pas mal de voix sur « The Mirror Concpiracy ».
Oui avec le temps on évolue de plus en plus vers un délire de soundtrack, alors qu’au départ on plaisait beaucoup aux beatheadz. Les rythmiques étaient plus épaisses. Mais du coup les Américains accrochent encore plus. La patron de Spin magazine (magazine de rock US fortement mainstream, ndr) adore notre album. Les Américains ont besoin de catégories simples.

Vous ne vous sentez pas un peu esseulés quand même en Amérique ?
Je conçois vraiment la musique comme un langage internationale, même si c’est un peu cliché de le dire. Je suis plus heureux de venir faire de la promo en Europe qu’aux Etats Unis s’il fallait choisir. 

Pourquoi avoir donné ce nom à votre album ?
Rob lisait un truc sur la conspiration du triangle. Les Américains raffolent de théorie du complot, on trouvait que c’était marrant. Ca ne veut rien dire du tout.

Considérez vous votre musique comme étant élitiste ?
Non. Je comprends le sens de ta question, mais justement, malgré l’image que l’on donne de nous mêmes, on fait très attention à ça. On ne veut pas être élitiste en matière de musique. Je veux dire, je suis fan de Led Zeppelin si ça te suffit comme réponse. Et on ne réserve pas notre musique à un public de rentiers et de mannequins maigrichonnes. La dernière fois qu’on était à New York, on a été invité à jouer dans une soirée huppée dans un endroit à la mode. On n’a joué que dix minutes puisque l’assemblée ne voulait entendre que de la house cheesy super commerciale. Je ne sais pas si tu l’avais remarqué, mais les mannequins n’ont souvent aucun goût en matière de musique ! Nous aimons les endroits intimistes, les bars. On vient de finir une tournée d’une vingtaine de dates, au Portugal, en Italie, en Angleterre. Et de temps en temps on joue dans notre club le 18th Street Lounge à Washington.

C’est pas trop complexe de gérer un club ?
Déjà on a un bail sur dix ans ce qui nous laisse une certaine sécurité, indirectement ça nous permet de prendre des risques. C’est un vieux manoir sur trois étages. Notre équipe de videurs est constituée de rastafariens. Et les femmes sont délicieuses. Ca s’améliore chaque année, c’est ouvert du mardi au samedi. Si vous passez par Washington, n’hésitez pas à faire un tour.

Line up :
Rob Garza
Eric Hilton

Label :
Eighteenth Street Lounge Music

Tracklist :
01 – Web of Deception
02 – Culture of Fear
03 – Take My Soul
04 – Light Flares
05 – Stargazer
06 – Where It All Starts
07 – Tower Seven
08 – Is It Over
09 – False Flag Dub
10 – Safar (The Journey)
11 – Fragments
12 – Overstand
13 – Free